Association pour la légalisation du suicide assisté et de l'euthanasie volontaire

Pour une loi de Fin de Vie Volontaire, pour les personnes âgées

( Texte proposé par Philippe Dupont, dans le cadre d’un groupe de travail d’ antenne )

Chaque vie a une fin :

  • Un accident brutal, matériel ou pathologique.
  • Une maladie incurable
    Aujourd’hui, en France, si un malade incurable veut mettre fin à ses jours, ce n’est pas sa volonté qui s’impose. C’est la décision du corps médical qui peut, sous conditions restrictives, prescrire des soins palliatifs entraînant la fin de vie après une agonie qui peut être longue et douloureuse. Il est admis que ce processus n’est pas l’assurance d’une fin digne pour le malade.
    C’est pourquoi les associations militantes, et maintenant semble-t-il une majorité de parlementaires, sont déterminés à obtenir une loi permettant l’euthanasie volontaire, mais seulement en cas de maladie incurable invalidante, ou d’accident invalidant.
    L’opinion publique est maintenant favorable à cette disposition et le pouvoir politique devrait la faire aboutir à plus ou moins long terme. Ce sera la Loi n°1.

    Elle n’est pas encore acquise, mais il n’y a plus à l’instruire et à la promouvoir mieux que ce qui a déjà été fait, et elle n’ira pas au-delà.

  • Il reste que la mort survient le plus souvent au terme d’une vieillesse sans pathologie spécifique.

    C’est la perte d’autonomie qui impose d’avoir recours à des aides, à domicile ou en Ehpad, qui peuvent être ressenties comme dégradantes. C’est à cette obligation que l’on peut vouloir échapper.
    Nos institutions ignorent cette étape inéluctable qu’est la fin de vie, alors qu’elles encadrent et accompagnent toutes les étapes de la vie : la naissance, l’éducation, la vie active, la retraite…, mais pas la fin de vie.
    C’est cette lacune qu’il convient de combler pour obtenir une autre loi sur la fin de vie volontaire. Ce sera la Loi n°2. Il faut pour cela lever un tabou profondément ancré dans notre culture. L’enjeu n’est plus de statuer sur l’intervention du corps médical, mais d’ouvrir un large débat de société touchant à la fois aux fondements de nos institutions et aux convictions intimes de chacun, dans le but d’arriver finalement à convaincre le pouvoir politique de s’engager.

    Il y a donc maintenant à instruire un débat dans deux directions : les institutions, et la sensibilité individuelle.

1 – Loi n°2 sur la Fin de Vie Volontaire : Approche institutionnelle

Dans notre État de droit, les lois définissent les droits et devoirs réciproques entre l’individu et la collectivité, et mettent des limites aux aspirations individuelles en regard de l’intérêt général de la collectivité.

Ainsi, les lois qui interdisent de tuer, mais aussi d’aider au suicide, ou qui pénalisent la non-assistance à personne en danger, ont pour finalité d’assurer la sécurité des personnes, mais aussi de protéger l’intégrité et les intérêts de la collectivité, et d’assurer que chacun de ses membres ne peut pas se soustraire, de lui-même, à son devoir de contribuer à l’effort collectif.

Ce n’est qu’au terme de sa vie, qu’une personne peut faire valoir son incapacité à contribuer à l’effort collectif, et que la collectivité peut de son côté renoncer à exiger sa contribution active.

Une personne âgée, ayant accompli ses devoirs envers la collectivité, peut alors revendiquer, si elle le souhaite, la liberté de mettre fin volontairement à sa vie.

La plus explicite des dispositions institutionnelles à ce sujet, est l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui est comprise dans la Constitution de 1958, et qui stipule que «  La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, … ».

Une personne âgée en perte d’autonomie peut dès lors, sans nuire à autrui, revendiquer la liberté de mettre fin à sa vie.

2 – Loi n°2 sur la Fin de Vie Volontaire : Approche individuelle

Si les institutions ne s’y opposent pas, cette liberté est-elle cependant souhaitée aujourd’hui par la population ?

– Au niveau individuel, le sujet est tabou, ou plutôt était tabou car beaucoup de choses ont changé depuis 50 ans :

Les mentalités et les spiritualités ont évolué, et l’évocation de la mort est maintenant moins inconvenante.

Les progrès de la chirurgie et des traitements thérapeutiques ont prolongé la vie en état de « bonne santé », mais avec des capacités, physiques ou mentales amoindries.

La structure familiale s’est modifiée, du fait de l’évolution des conditions économiques et de l’urbanisation, entraînant la séparation des parents âgés de leurs enfants et petits-enfants.

La population âgée se trouve ainsi confrontée à la perspective inéluctable du moment de sa perte d’autonomie, pour cause de déficience physique ou mentale. A ce moment, si elle n’a pas de support familial disponible pour l’accueillir, elle sera acculée à devoir recourir à des services d’aide à domicile ou à trouver refuge en Ehpad.

La perspective de vivre dans ces conditions, pendant une durée indéterminée, est angoissante. Chacun peut, pour lui-même, soit l’accepter comme une fatalité incontournable, soit l’appréhender comme une atteinte à sa propre dignité. Si l’option de pouvoir alors mettre fin à sa vie était possible, la perspective de la perte d’autonomie serait alors moins angoissante.

De multiples facteurs viennent ainsi renforcer une approche raisonnée de la fin de vie et réduire les réflexes traditionnels et conservateurs d’opposition à la liberté de choisir sa fin de vie.

– Au niveau des associations militantes qui se sont mobilisées pour contrer l’acharnement thérapeutique, on constate qu’elles restent focalisées sur leur objectif initial, et n’ont pas fait évoluer leur ligne revendicative. Si les responsables de ces associations pensent ainsi faire preuve d’efficacité à court terme et être loyaux à l’égard de leurs adhérents, il n’est pas certain que ces derniers n’aient pas évolué dans leurs convictions intimes vers une aspiration à plus de liberté individuelle.

3 – Loi n° 2 pour la Fin de Vie Volontaire : Quelle suite ?

– Au plan national, le moment venu, ce sujet de société tout à fait fondamental et transpartisan devra vraisemblablement faire l’objet d’un référendum.

Le gouvernement évoque l’idée d’une convention citoyenne sur la fin de vie. Ce serait le moyen d’ouvrir un vrai débat public sur le sujet.

– Au niveau des associations militantes le débat peut s ‘engager dès maintenant. En premier lieu par des sondages organisés à l’intérieur des associations concernées, en vue de sensibiliser les responsables politiques qui vont être impliqués dans les prochaines campagnes électorales présidentielles et législatives.

La mobilisation pour obtenir la Loi n°1 contre l’acharnement thérapeutique ne doit pas faiblir, mais il reste à ouvrir le débat, d’une autre nature, pour obtenir la Loi n°2 pour la Fin de Vie Volontaire des personnes âgées.

C’est le défi lancé à nos institutions pour prendre en compte, au plan sensible comme au plan rationnel, les aspirations individuelles d’une large part de la population.

C’est l’adaptation nécessaire de notre Constitution aux conditions réelles de vie de l’époque actuelle.

4 – Loi n°2 pour la Fin de Vie Volontaire : Conditions d’application(à débattre)

L’application de cette loi relève de l’autorité du Ministère de l’Intérieur, comme tout autre acte d’état civil.

L’application des règles et procédures est confiée dans chaque territoire ( commune, communauté de communes, canton, département ? ) à un bureau chargé de recevoir les demandes, d’instruire les dossiers et de délivrer les autorisations.

Le dossier à constituer lors de chaque demande doit comporter les éléments permettant de vérifier la libre expression de la demande et l’absence de nuisance pour la collectivité :

  • Le respect d’un seuil d’âge : 75, 80 ans, ou l’espérance moyenne de vie soit 82 ans ?
  • Le caractère libre et conscient de la demande, ce qui peut nécessiter un questionnement rigoureux du demandeur, et/ou un avis médical, et/ou l’existence de directives anticipées.

  • Vérifier que le conjoint, les parents et les enfants du demandeur ont été informés de la démarche.

  • Vérifier l’absence de dette pénale ou financière du demandeur.

  • Exprimer le souhait du demandeur concernant le traitement de sa dépouille.

  • Observer un délai minimum de réflexion entre la demande et l’autorisation ( 1 mois, 3 mois ?).

La validation de ces conditions entraîne l’acceptation de la demande et la délivrance d’une autorisation pour retirer une dose de produit létal en pharmacie, que le demandeur pourra s’administrer à domicile ou dans un lieu dédié, en présence d’un proche, d’une personne de confiance ou d’un représentant du service public.

Il faut aussi prévoir de récupérer les doses létales qui ne seraient pas utilisées, et de permettre à tout moment à un demandeur de renoncer explicitement à sa demande.

Ces dispositions devraient évidemment être formulées dans le respect des contraintes pratiques et légales par les personnes compétentes.

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Philippe Dupont

15 décembre 2021

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