Le texte de l’Appel
Les perspectives d’accroissement exponentiel de l’épidémie du Covid 19 conduisent à l’engorgement des hôpitaux par un afflux de patients en détresse respiratoire extrême.
D’ores et déjà la probabilité quasi-nulle de survie de certains malades très âgés et polypathologiques conduit à ne pas les mettre en réanimation afin de garder des places pour des patients ayant plus de chances de guérison.
Qu’est-il prévu pour que ceux qui sont écartés de la réanimation ne soient pas condamnés à une agonie longue et douloureuse ?
Nous recevons de nombreuses déclarations de personnes affirmant qu’elles ne souhaitent pas être mises en réanimation ou qu’en cas d’impossibilité de bénéficier d’une ventilation artificielle, elles demandent une fin « sans douleur ni angoisse ».
La sédation profonde et continue prévue par la loi est difficilement réalisable dans le contexte actuel, car elle nécessite d’importants moyens humains et médicamenteux.
Nous demandons donc solennellement que ceux qui en exprimeraient la volonté expresse, répétée et vérifiée (notamment par leurs directives anticipées) puissent bénéficier d’une aide médicale pour leur épargner une fin cruelle.
Dans ce contexte exceptionnel d’urgence, nous demandons au gouvernement d’autoriser pour ceux qui le souhaitent une sédation rapide et efficace qui évite les douleurs terribles de la suffocation, même au prix d’abréger la vie. Nous lui demandons aussi d’inciter chacun à écrire ses directives anticipées.
C’est en répondant aux volontés des patients que les décisions des soignants, déjà difficiles à prendre, pourront être rendues plus humainement supportables.
Il s’agit là d’une question d’humanité.
Les signataires de l’Appel :
Annie Babu et Denis Labayle coprésidents du CHOIX Citoyens pour une mort choisie.
Claude Hury Présidente d’ULTIME LIBERTE.
Le Collectif pour une mort sereine.
Commentaire de la rédaction du site Ultime Liberté :
( rédigé par Armand Stroh, ce n’est pas un commentaire officiel du C.A. )
La rédaction de ce texte d’Appel commun a été longue à construire, en raison des ajustements nécessaires entre les propositions des trois associations, mais surtout parce qu’à l’intérieur de chaque association il n’ y a pas eu d’accord spontané sur l’opportunité ou non de cet Appel commun pour mieux faire connaître les positions de ces associations concernant la révision nécessaire de la législation sur la fin de vie :
1. Certains ont pensé qu’un tel appel commun était une occasion pour demander dans l’urgence au gouvernement de réviser à titre exceptionnel les insuffisances de la Loi Cleys Leonetti de 2016, en particulier pour les personnes atteintes du Covid-19 et dont la situation médicale était jugée impossible à prendre en charge par une réanimation lourde, entraînant plus de risques encore qu’en les laissant finir « tranquillement » leur vie.
C’est sur cet aspect que certains auraient voulu absolument faire passer, éventuellement par ordonnance, la nécessité de permettre à ces patients de recourir, évidemment seulement à leur demande, à une forme ou une autre d’ « Aide active à mourir » ( suicide assisté ou euthanasie )
2. D’autres adhérents pensaient qu’il était inopportun, dans la situation de crise actuelle, où une grande majorité des malades atteints ne pense qu’à s’en sortir le mieux possible, de soulever dans l’urgence le problème du droit à une « Aide active à mourir », et qu’il valait mieux attendre que la crise sanitaire soit passée, pour relancer le débat politique sur la fin de vie.
Le texte finalement adopté de l’Appel, ne comporte plus l’ expression « aide active à mourir », ni même « aide médicale à mourir », mais parle seulement d’ « aide médicale » ( ce qui peut aussi convenir aux soins palliatifs, ou à toute autre procédure médicale compatible avec la Loi Claeys Leonetti actuelle ).
La phrase retenue demande donc au gouvernement « d’autoriser pour ceux qui le souhaitent une sédation rapide et efficace qui évite les douleurs terribles de la suffocation, même au prix d’abréger la vie. »
On peut donc interpréter cette phrase comme signifiant simplement une particulière insistance sur la légitimité du « double-effet » .
Dans ces conditions, il est pour nous regrettable que l’ADMD, dans sa globalité, et non pas seulement à travers le Collectif « Pour une mort sereine », n’ait pas cru acceptable de signer cet Appel commun.
3 commentaires sur “Appel du 30 mars 2020 des associations Ultime Liberté, Le Choix et du Collectif « Pour une mort sereine »”
Suite à l’appel du 30 mars des associations U.L., Le Choix et Collectif pour une mort sereine, Armand S. a écrit sous le titre « Epidémie Covid 19 et action d’U.L.: « Un certain nombre de nos adhérents ou de membres du C.A. ont proposé de « profiter » de l’occasion de cette épidémie, pour rappeler nos objectifs. Certains déplorent qu’on n’entende dans les médias aucune allusion à cette question, alors que l’on est en pleine situation concrète de décisions à prendre par les personnes gravement malades et par les équipes médicales de réanimation.
Certains ont pensé que cela serait utile de demander dans l’urgence au gouvernement qu’il autorise les médecins des équipes soignantes à procéder à des euthanasies si les malades gravement atteints le demandaient. »
Voici mon commentaire : En regard de la Loi, et en cette période assez inouïe de pandémie CoViD19 des problèmes spécifiques sont apparus sur le terrain.
Suite à une insuffisance de réserve de la molécule la plus communément utilisée en première intention pour une sédation terminale, le Midazolam, le gouvernement a émis le 29 mars un décret qui stipule que :
« le Rivotril ( produit préconisé en deuxième intention par la HAS ) sous forme injectable peut faire l’objet « d’une dispensation, jusqu’au 15 avril 2020, (prolongée depuis hier 16 mars jusqu’au 11 mai) pour un accès en médecine de ville et donc dans les EHPAD.
Cela répond clairement, à mon sens, à l’urgence face à des patients non réanimables (ou pcq trop vieux et pas de place en lit de réanimation) et qui se trouvent en détresse respiratoire.
Le Pr Vincent Morel, chef de service soins palliatifs au CHU de Rennes, et président du conseil scientifique de la SFAP, estime que : « « Nous avons besoin de ces dérogations, pour être sûrs qu’à n’importe quel endroit du territoire, on puisse avoir accès à l’une des quatre molécules permettant de prendre en charge des détresses respiratoires asphyxiques à domicile ou en EHPAD ».
« ces pratiques sédatives…s’appliquent surtout en cas de détresse respiratoire insupportable, pour soulager le patient quand on sent que le décès va intervenir », insiste encore le Pr Morel.
D’aucuns y ont vu une légalisation de l’euthanasie.
Le syndicat des Jeunes Médecins a demandé au Conseil d’État de suspendre ce dispositif de dérogation. « L’administration de cette molécule (contre-indiquée en cas d’insuffisance respiratoire) à un patient souffrant du Covid-19 aura pour effet d’atteindre une sédation terminale à domicile entraînant le décès », argumente le syndicat. Et de considérer que la collégialité n’est pas suffisamment encadrée par ce décret.
Le Pr Olivier Guérin, président de la Société française de gériatrie et gérontologie (SFGG), tente alors de désamorcer la polémique.
Il précise que dans cette prescription hors autorisation de mise sur le marché (AMM), le médecin doit « se conformer aux protocoles exceptionnels et transitoires relatifs, d’une part, à la prise en charge de la dyspnée et, d’autre part, à la prise en charge palliative de la détresse respiratoire, établis par la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) ».
Face à ces informations factuelles, U.L. pourrait (devrait?) alerter l’exécutif, les députés, la HAS et toute instance qui pèse sur les décisionnaires pour faire avancer cette cause: obtenir une aide à mourir à toute personne, capable, qui le demande soit directement, soit par ses D.A. si elle n’est plus consciente.
Faute de quoi « bis repetita » dans la prochaine grave crise sanitaire ??