RTS ( Suisse ) L’invité du 12h30 – François Galichet, philosophe et professeur honoraire à l’Université de Strasbourg
Présentation de l’ouvrage de François Galichet :
Par François Galichet
Bonjour à tous,
J’ai le plaisir de vous annoncer la parution de mon ouvrage Qu’est-ce qu’une vie accomplie ? aux éditions Odile Jacob.
Ce livre prend sa source dans une enquête menée auprès d’adhérents d’Ultime Liberté détenant le moyen de quitter la vie sans douleur ni violence J’avais déjà communiqué le compte-rendu de cette enquête lors de plusieurs séminaires UL. Il fait l’objet d’un chapitre de l’ouvrage (en respectant bien entendu l’anonymat des personnes) et débouche sur un constat paradoxal : la grande majorité des personnes interrogées déclarent être plus heureuses, plus sereines, plus désireuses de vivre que si elles n’avaient pas ce moyen.
Comment expliquer que la liberté réelle de mourir permette de mieux vivre ? C’est tout l’objet du livre. Il vise à montrer que cette capacité à délimiter sa vie la transforme. Elle n’est plus une condition à assumer, comme la plupart des philosophies nous le disent. Elle devient une œuvre à accomplir, comme un peintre crée un tableau ou un écrivain un roman. Elle exige une réflexion continue, une évaluation de soi qui ne se réduit pas à une simple méditation pour plus de bien-être, comme le recommandent les très nombreux ouvrages axés sur le “développement personnel”..
Comme vous le savez, la notion de “vie accomplie” fait l’objet d’un débat, notamment en Belgique et au Pays-Bas. Elle conduit à demander le droit à l’aide au suicide non seulement pour les personnes en fin de vie, mais plus largement pour toute personne qui le souhaite après mûre réflexion. C’est la position majoritaire au sein des adhérents UL, comme l’a montré une autre enquête menée il y a un an.
La crise pandémique récente a révélé le statut problématique de la vie biologique. Pour la préserver, on a sacrifié momentanément les autres formes de vie – sociale, culturelle, économique, et même politique. Elle s’est érigée en fin souveraine, préalable et condition de toutes les autres. Mais certains se sont insurgé contre cette « tyrannie de la santé à tout prix » et ont revendiqué le droit de prendre des risques, y compris celui de la mort.
Comment arbitrer entre ces deux positions ? Le livre examine le cas d’écrivains (Zweig, Hemingway, Romain Gary ) qui se sont donné volontairement la mort, mais seulement quand ils jugeaient leur œuvre accomplie. Peut-on transposer cette démarche à la vie elle-même ? La réponse à cette question permet de distinguer une vie « accomplie » d’une vie « réussie », « épanouie », « heureuse », ou même simplement « bonne ». A la sagesse de Spinoza qui invite chacun à « persévérer dans son être », elle préfère celle de Montaigne qui recommande de « mourir quand on doit et non quand on peut ».
J’espère
que ce livre, qui s’inscrit dans la défense des idées qui sont les
nôtres, intéressera certains d’entre vous. Je suis tout prêt à échanger
sur cette liste ou ailleurs autour des questions qu’il développe.
Bien cordialement,
François Galichet